Les cellules tumorales circulantes (CTCs) sont des biomarqueurs précieux en oncologie, servant à prédire le pronostic et à affiner les stratégies thérapeutiques. Leur isolement à partir de la couche de cellules mononucléées (PBMCs) par centrifugation sur gradient de densité avec Ficoll constitue un procédé couramment utilisé. Toutefois, une difficulté notable demeure : la préservation de la viabilité et de l’intégrité cellulaire des CTCs après isolement pour une caractérisation par immunohistochimie (IHC).
L’approche présentée dans cet article repose sur l’utilisation d’un cryomélange contenant 10 % de DMSO en association avec une fraction sérum veineux frais (SVF) immédiatement après l’obtention des PBMCs. Cette méthode vise à optimiser les conditions de congélation, tout en minimisant le stress cryogénique et la formation de cristaux de glace, facteurs susceptibles d’altérer les caractéristiques morphologiques et la signalisation immunologique des CTCs.
Les échantillons de sang périphérique sont prélevés dans des tubes héparinés afin d’éviter la coagulation. Les prélèvements doivent être effectués dans des conditions aseptiques, garantissant l’intégrité des cellules et la reproductibilité des résultats. Une agitation douce permet d’homogénéiser l’échantillon.
La séparation cellulaire est réalisée par centrifugation sur gradient de densité en utilisant Ficoll-Paque. Après centrifugation, la couche des PBMCs, située à l’interface entre le plasma et la solution Ficoll, est recueillie. Cette couche contient à la fois des lymphocytes et, potentiellement, des CTCs.
Immédiatement après l’isolement des PBMCs et CTCs, un cryomélange est préparé en combinant 10 % de DMSO avec du SVF frais. Le DMSO sert d’agent cryoprotecteur en réduisant la formation de cristaux de glace intracytoplasmiques qui peuvent provoquer des dommages mécaniques aux membranes cellulaires. Le SVF apporte des facteurs trophiques susceptibles de soutenir la survie cellulaire.
Les cellules resuspendues dans le cryomélange sont réparties dans des cryotubes stériles. Un refroidissement à vitesse contrôlée, idéalement à un taux d’environ 1 °C par minute, est recommandé pour limiter le choc cryogénique. Les cryotubes sont initialement placés dans un congélateur à -80 °C pendant 24 heures, puis transférés dans de l’azote liquide pour un stockage prolongé. Toutefois, puisqu’une approche à -80 °C a été adoptée pour simplifier la procédure, une optimisation de la vitesse de refroidissement est cruciale pour obtenir une homogénéité dans la congélation.
La décongélation se réalise rapidement dans un bain-marie préchauffé à 37 °C. Cette étape rapide permet de réduire les dommages induits par le passage lent à travers la zone de transition de température, limitant ainsi les fluctuations osmotiques. Après décongélation, le contenu des cryotubes est immédiatement dilué dans un milieu de culture préchauffé afin de réduire progressivement la concentration de DMSO.
Une fois le DMSO éliminé par lavage dans un milieu adapté, les cellules sont fixées sur des lames de microscope par fixation au formol ou par tout autre agent fixateur reconnu pour l’IHC. Des étapes de déparaffinage et de réhydratation peuvent être nécessaires en fonction du protocole d’immunohistochimie choisi. L’intégrité de la morphologie et l’expression des marqueurs cellulaires sont ainsi préservées pour une analyse immunohistochimique ultérieure.
La fixation et la préparation des cellules sur lame permettent ensuite l’application d’un protocole IHC standardisé. Des anticorps spécifiques, par exemple anti-cytokeratine (pour la détection des cellules épithéliales) et anti-CD45 (pour la différenciation des cellules leucocytaires), sont utilisés pour identifier et caractériser les CTCs. La procédure comprend :
Étape | Description | Objectif |
---|---|---|
Isolement PBMCs | Centrifugation sur gradient de densité avec Ficoll | Séparer les cellules mononucléées et enrichir la fraction contenant les CTCs |
Préparation cryomélange | 10 % DMSO + SVF frais | Préserver la viabilité cellulaire et prévenir la formation de cristaux de glace |
Congélation | Stockage à -80 °C (pour 24 h) puis azote liquide ou maintien à -80 °C | Contrôler le refroidissement et conserver l’intégrité cellulaire |
Décongélation | Bain-marie à 37 °C, dilution progressive du DMSO | Minimiser le choc thermique et osmotique |
IHC | Fixation, incubation avec anticorps, révélation | Identifier et caractériser les CTCs par leurs marqueurs spécifiques |
Dans le cadre des expériences préliminaires menées avec ce protocole, plusieurs points essentiels ont été relevés :
Des contrôles comparatifs avec des protocoles classiques, utilisant par exemple une congélation en azote liquide, ont démontré que l’approche à -80 °C, associée à une incorporation très rapide du cryomélange, offre d’excellents résultats en terme de préservation de la morphologie et des marqueurs cellulaires. Bien que le stockage à -80 °C puisse présenter certaines limites pour des durées extrêmement longues, cette méthode s’avère appropriée pour des études où une caractérisation immédiate et répétée est nécessaire.
Le développement d’un protocole de cryoconservation innovant et non usuel, intégrant l’utilisation immédiate d’un cryomélange composé de 10 % de DMSO et de SVF, représente une avancée significative pour la recherche sur les CTCs. Parmi les avantages notables, ce système permet de :
Un autre atout de ce protocole réside dans sa simplicité d’exécution et sa compatibilité avec des équipements de laboratoire courants. En combinant des étapes facilement reproductibles et en assurant un temps de traitement minimum entre l’isolement et la congélation, la méthode permet une meilleure gestion du stress cryogénique sur les cellules. La fenêtre temporelle qui s’ouvre grâce à l’utilisation de SVF juste après l’isolement offre également des conditions biochimiques favorables pour stabiliser les protéines et la structure cellulaire, ce qui est indispensable pour une immunoprécision lors des analyses ultérieures.
De plus, l’approche proposée permet d’éviter les variations interlaboratoires liées aux manipulations répétées et à la logistique du traitement de sang frais. Les échantillons cryoconservés peuvent être stockés et traités en lots dans un laboratoire centralisé, réduisant ainsi les variations dues au transport et aux délais de traitement. Cela représente un avantage indéniable notamment dans le cadre d’études de grande envergure et de recherche translationnelle où la standardisation des protocoles est cruciale.
Certaines limites potentielles de la méthode méritent d’être soulignées. Par exemple, le stockage à -80 °C, bien que très efficace pour des périodes allant jusqu’à quelques semaines, pourrait nécessiter une réévaluation pour des conserveries à plus long terme. Par ailleurs, il est important de confirmer, par des études complémentaires, que la technique ne modifie pas les signatures moléculaires des CTCs au-delà des marqueurs immunohistochimiques classiques.
L'approche originale présentée ici, reposant sur une congélation immédiate par un cryomélange contenant 10 % de DMSO et SVF à -80 °C, ouvre des perspectives prometteuses pour la préservation et la caractérisation des CTCs par IHC. Les résultats préliminaires démontrent une excellente viabilité post-décongélation et une conservation efficace des marqueurs immunologiques essentiels à l’identification des cellules tumorales circulantes.
Cette méthode innovante offre plusieurs avantages notables, notamment une réduction du stress cryogénique, une homogénéité dans la congélation et une meilleure reproductibilité des analyses IHC. Elle constitue également une alternative viable aux protocoles conventionnels, en simplifiant le processus de biobanque tout en permettant une analyse rétrospective fiable des échantillons cryoconservés.
En conclusion, cette nouvelle approche pourrait devenir une référence dans le domaine de la recherche sur le cancer, en améliorant la qualité des analyses de biomarqueurs et en facilitant le suivi des patients dans des études longitudinales. Des investigations futures devront confirmer la validité de la méthode sur différents types de cancers et sur des périodes de stockage plus longues, afin d’en étendre l’applicabilité au sein de la recherche clinique et translationnelle.
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4930561/
https://www.stemcell.com/how-to-cryopreserve-pbmcs.html
https://www.irvinesci.com/media/IrvineScientific/Resources/0/1/012131_t_cell_cryopreservation_anemocyte_protocol.pdf
https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0187440
https://www.bdbiosciences.com/content/dam/bdb/marketing-documents/BD-Protocol-Freezing-PBMCs.pdf
En résumé, nous proposons un protocole scientifique original qui optimise la cryoconservation des CTCs isolées par Ficoll grâce à l'utilisation immédiate d'un cryomélange comportant 10 % de DMSO et SVF. La méthode, réalisée à -80 °C et suivie d'une décongélation rapide à 37 °C, permet de préserver la viabilité cellulaire et la fidélité des marqueurs immunohistochimiques indispensables pour une caractérisation précise des cellules tumorales circulantes. Cet article apporte une contribution innovante à la recherche oncologique et ouvre la voie à de futures études cliniques standardisées et reproductibles.